Page:Eugène Le Roy - Le Moulin du Frau.djvu/423

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bûmes de bons coups, comme si jamais de la vie on n’eût ouï parler de phylloxera. L’ennui des premiers temps était un peu amorti, et après avoir attendu inutilement la guérison des vignes, nous nous prenions maintenant à espérer qu’on pourrait les refaire, comme de fait ça arrive.

Quelques années se passèrent comme ça, sans rien d’extraordinaire au Frau. Depuis assez longtemps, nous n’avions plus de métayers, et mes garçons et moi nous travaillions seuls tout notre bien. D’ailleurs, c’était toujours notre même train de vie d’autrefois ; aussi je ne rapporterai pas des choses journalières pareilles à d’autres dont j’ai parlé déjà, ne voulant pas, si je puis, rabâcher encore. C’est bien assez que j’aie raconté des affaires qui, probable, n’intéresseront personne que les miens. Et puis, il faut que je le dise aussi, je me rappelle bien tout ce qui s’est passé dans le temps chez nous ; je me souviens très bien de toutes nos anciennes affaires ; mais pour celles d’hier, de l’année passée, d’il y a deux ans, même dix ans, je les ai quasi presque oubliées, et quelquefois je suis obligé de les demander à ma femme : je mentionnerai donc seulement les choses marquantes pour nous.

En 1882, il me naquit deux petits-enfants : une drole de ma nore Victoire, et un drole de Nancette. Elle qui avait déjà un garçon aurait tant aimé une fille, et Hélie, pour son premier enfant, aurait voulu un mâle ; mais ces affaires-là ne s’arrangent pas comme on veut.

À la fin de 1883, Bernard fut nommé officier dans un régiment qui était à Brive. Ça fut une grande affaire chez nous, et bien des gens m’en firent compliment ; mais je ne fais pas grand état de toutes ces félicitations, parce que je sais que parmi les complimenteurs, il y a d’ordinaire beaucoup de flacassiers.

Lorsqu’il vint en permission, il y eut grande fête à