Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/149

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disposé à se laisser épouser. En attendant une heureuse rencontre ou le résultat des démarches de la maison de Foy, « quarante ans de succès », elle dirigeait le ménage de son frère, ne manquait pas une séance du Palais-Bourbon et s’essayait à la vie publique.

Depuis son veuvage, le conseiller la trimbalait cramponnée à lui, au cours des visites qu’il faisait dans le canton pour entretenir son influence. On les invitait aux noces, aux fêtes de village ; et la dame, grande rousse au type de juive vénitienne, aimait fort ces tournées où l’on festoyait chez des protégés reconnaissants, ou des aspirants aux faveurs du gouvernement impérial. Après ces plantureux repas où l’on buvait en trinquant, à la vieille mode périgordine, la sœur du conseiller chantait la gaudriole, ma foi, et lorsqu’il y avait des éléments, dansait un petit cancan au son de la « chabrette » ou de la vielle. Bonne personne, d’ailleurs, et ne méprisant pas l’aisance campagnarde et la rusticité paysanne, quoique habituée aux raffinements d’un luxe de mauvais goût.

Dans ces petits voyages, ces fêtes, ces parties de plaisir, mademoiselle Duffart, — qui avait repris son nom de famille un peu pour se rajeunir, et surtout parce que le nom du défunt capitaine Bourricq prêtait à une féminisation désagréable, — mademoiselle Duffart donc était en plein dans son élément, comme