Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/256

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caractérisé dans les foules, quelques jeunes gens, faute de confetti, se mirent en quête de projectiles, et les graines fourragères, le chènevis, le millet commencèrent à voler en l’air. On allait remplir ses poches chez l’épicier Tronchat, qui en un rien de temps eut vidé ses sacs. Le commis des tabacs s’empara des bocaux d’empois de l’épicerie, mais cette munition, qui ressemblait un peu aux vrais confetti, devait être bientôt épuisée. Alors Exupère eut une idée de génie : il courut chez lui, arracha une couette d’un lit et, la coupant en deux, en donna la moitié à son cousin, puis tous deux revinrent dans la foule jeter la plume à poignées. Ce fut alors une mêlée générale, et mademoiselle Duffart, qui avait l’avantage des armes, fut vivement poursuivie par un groupe qui compensait par le nombre l’insuffisance de sa mitraille d’occasion. Comme sa robe était, à la mode du temps, largement ouverte en cœur par devant, c’était là que les assaillants visaient, et les graines, les plumes, et l’empois pleuvaient sur elle, malgré sa vigoureuse défense et les efforts de John pour la protéger. Bientôt les jeunes gens, encouragés par ses allures, vinrent lui jeter leurs munitions à bout portant, et M. Pradelier, comme l’âne imitant le petit chien, finit par lui fourrer une poignée de plumes entre les tetons.

Alors elle se réfugia au manège et se campa pittoresquement sur un cheval bleu, avec des effets de