Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/261

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Dinah, qui devinait le sens caché de ce badinage, s’égayait franchement maintenant, heureuse de se frotter au pantalon garance du cousin. M. Duffart, lui, mangeait avec appétit, sans chercher à comprendre ces balivernes, non plus qu’Exupère, très occupé à conter des douceurs à madame Grosjac.

Le champagne acheva de griser honnêtement les convives déjà un peu émus, sauf M. Duffart et madame de Caveyre, qui ne dépassèrent pas une douce gaieté. La vieille dame contemplait la joyeuse tablée avec un bon sourire sur ses lèvres aristocratiques. Les jeunes faisaient des folies : les cavaliers buvaient subrepticement dans le verre de leur voisine, lui pressaient le pied sous la table ou lui parlaient à l’oreille de si près qu’on eût dit un baiser.

Puis on trinqua ferme, à la vieille mode du Périgord, et M. Duffart but à la santé de la respectable madame de Caveyre, qui unissait à « une sage expérience la gaieté charmante de la jeunesse ». Le lieutenant lui succéda et porta un toast troubadouresque :

— Aux dames !… qui font le bonheur de la vie !

Après cela, ce garnement de John, continuant sa farce, leva son verre avec un sérieux comique et dit :

— À la vengeance ! au plaisir des dieux !

Puis tous se mirent à bavarder à la fois, sans s’entendre, lorsque la blonde madame Grosjac, qui avait le champagne sentimental, fit une proposition :