Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/316

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diaboli ! … Ce bigre de latin les troublait. Et alors il les exhortait à peser sur leurs maris pour éloigner de leur paroisse cette hideuse hérésie. Mais il eut beau faire, tout ce qu’il put obtenir, ce fut que l’église resterait affectée au culte catholique pour les anciens paroissiens demeurés fidèles à leur foi ; et ce ne fut pas sans peine qu’il obtint cela. Enfin, trois ou quatre femmes de conseillers municipaux, bien stylées, gagnèrent leurs maris par divers moyens suggérés, qui avaient besoin de l’excuse d’une bonne cause, notamment par des refus opportuns du debitum, et ces quelques-uns, appuyés par le sous-préfet, firent accepter cette transaction à leurs collègues.

Lorsque donc arriva le pasteur, il fut obligé de commencer les exercices de son culte dans une salle de café abandonnée pour cause de faillite. C’était une grande pièce au plancher boueux et mal joint, basse de plafond, enfumée et tapissée d’un vieux papier à dessins effacés, crasseux partout à la hauteur des tables qui la meublaient naguère, et tombant çà et là d’un mur salpêtreux. C’est dans ce taudis que « travaillaient » les prestidigitateurs du ruisseau, et que les chanteuses ambulantes, courant le pays à pied, ou dans de méchantes roulottes traînées par des ânes pelés, venaient brailler leurs chansons bêtement obscènes.

Dans cette salle encore imprégnée des senteurs des alcools frelatés, des absinthes vert-de-grisées,