Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/56

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faire l’officieux, de fourrer toujours son épissoir là où il n’avait que faire : bref, c’était une mouche du coche, un bavard inconsidéré et un brouillon.

Quoique en général il y ait entre fonctionnaires dépendant du même ministère une certaine facilité de relations, le receveur fut reçu un peu fraîchement chez M. Monturel. Le percepteur était vexé que M. Lefrancq ne l’eût pas classé dans les premiers en faisant ses visites ; et ces dames, qui, la veille, avaient attendu tout l’après-midi, en grande toilette, n’étaient pas moins dépitées.

Introduit au salon, le receveur vit arriver madame Monturel, grande femme maigre d’un blond fadasse, avec des incisives de rongeur, et armée d’un binocle d’or. On eût dit une Anglaise de vaudeville, ce qui, avec son allure roide, son air sévère et pédant, l’avait fait surnommer « mistress Pet-de-Loup » par le pharmacien, célibataire observateur. Cette apparence n’était pas d’ailleurs pour déplaire à la dame, car cette famille était atteinte d’anglomanie aiguë, au point que le fils Monturel ne répondait plus qu’au prénom de « John » et que sa sœur Marguerite avait transmué son nom en celui de « Margaret ». Comme l’expliquait ledit John, c’était beaucoup plus chic.

Miss Monturel, qui suivait, portait un pince-nez qui avait toutes les peines du monde à tenir sur son petit nez en pied de marmite ; au reste, blonde