Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/128

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l’esprit des populations. Nulle part peut-être cette situation n’est plus élevée qu’en Chine ; une seule chose est aussi vénérée que la science et les lettres, c’est la vieillesse. Si, dans les foules souvent importunes qui m’entouraient j’apercevais un vieillard, je le faisais inviter à venir me voir, je m’avançais au-devant de lui, et le conduisais à la place d’honneur. A l’instant même, les rumeurs et les quolibets cessaient ; le silence le plus complet s’établissait. En une minute, j’avais noué entre ces foules et moi ce premier lien commun dont l’absence est le plus souvent à l’étranger la cause des mécomptes qu’on éprouve, et ce lien commun c’était le respect de la vieillesse. Je n’étais plus un étranger, mais un hôte. Il en était de même des lettrés. Je ne manquais jamais, en arrivant dans une ville, de m’informer de ceux qui avaient le plus de réputation. J’allais les voir, et ces marques de déférence transformaient tout de suite en dispositions amicales et bienveillantes l’indifférence ou la méfiance que j’aurais pu rencontrer. L’instituteur qui a enseigné la lecture à un enfant conserve toujours à l’égard de son élève parvenu au rang le plus élevé le droit de réprimande. Il arrive souvent que les populations ayant à se plaindre de quelque fonctionnaire font venir, même de très loin, son ancien maître pour le prier d’être leur intermédiaire près du préfet, du gouverneur ou du vice-roi, et cet intermédiaire est toujours respectueusement écouté.

Malheureusement, si la carrière des lettres est la seule