Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/325

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LA NOURRICE.

Hélas sur moi ! Qu’as-tu dit, ma fille ? Ah ! je suis perdue ! Femmes, ceci est intolérable ; je ne supporterai plus la vie ; le jour m’est odieux et je hais la lumière ! Je rejette et j’abandonne mon corps ; je cesserai de vivre, je mourrai ! Salut ! Je ne vis plus désormais. Les plus vertueuses aiment donc le mal malgré elles ? Kypris n’est donc pas Déesse ? Elle est donc plus qu’une Déesse, s’il est quelque chose de plus grand, elle qui a perdu Phaidra, sa famille, et moi-même !

LE CHŒUR.

As-tu entendu, as-tu entendu la Reine avouer son mal lamentable et inouï ? Que je meure, ô chère, avant d’accomplir ce que tu as médité dans ton esprit ! Hélas sur moi ! hélas ! hélas ! Ô malheureuse à cause de ces maux ! ô misères, qui nourrissez les hommes ! Tu es perdue, tu as mis en lumière des choses affreuses. À combien de jours tels que celui-ci es-tu condamnée ! Quelque chose de nouveau va s’accomplir dans ce palais. Il n’y a plus à douter sur qui doit tomber la calamité envoyée par Kypris, ô malheureuse enfant de la Krèta !

PHAIDRA.

Femmes Troizéniennes, qui habitez le vestibule de la terre de Pélôps, déjà, bien des fois, pendant les longues nuits, j’ai réfléchi en moi-même à ce qui corrompt la vie des hommes. Et il me semble que ce n’est point par la nature de leur esprit qu’ils font le mal. Beaucoup, en effet, pensent sagement. Mais il faut considérer ceci : nous savons et nous connaissons le bien, mais nous ne le faisons pas, les uns par paresse, les autres parce qu’ils