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Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/417

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différence est grande en effet. Alors, j’entrais, avec les torches Péliennes, au bruit des chants nuptiaux, et tenant la main de ma chère femme. Une foule d’amis suivait bruyamment, nous proclamant heureux, cette morte et moi, parce que nous étions Eupatrides l’un de l’autre, époux et issus de noble race. Et, maintenant, ce sont des lamentations au lieu de chants nuptiaux ; et, au lieu de péplos blancs, ce sont de noirs vêtements qui m’accompagnent au lit désert de la chambre nuptiale !

LE CHŒUR.
Antistrophe II.

Cette douleur t’est survenue, au milieu de ta fortune heureuse, quand tu n’avais pas encore souffert ; mais tu conserves la vie et l’âme. L’épouse est morte et te laisse son amour ; qu’y a-t-il en cela de nouveau ? La mort a déjà séparé bien des hommes de leur femme.

ADMÈTOS.

Amis, je pense que la destinée de ma femme est plus heureuse que la mienne, bien qu’on puisse n’en pas juger ainsi. Désormais, en effet, aucune douleur ne l’atteindra, et la voici glorieusement affranchie de bien des misères ; mais, moi, qui devrais ne plus vivre, ayant passé le moment fatal, je traînerai une vie lamentable ! Je le sens maintenant. Comment aurai-je le courage d’entrer dans ces demeures ? À qui parler ? Qui me parlera ? Comment trouver le doux entretien ? Où me tourner ? La solitude des demeures me chassera, quand je verrai le lit désert de l’épouse et les thrônes où elle s’asseyait, et le plancher sali sous les toits ! Et mes enfants, prosternés à mes