Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/446

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MÉNÉLAOS.

J’arrive, ayant pris ton fils que tu avais caché dans une autre demeure, à l’insu de ma fille. Tu pensais que cette image de la Déesse te protègerait et celui-ci chez ceux qui l’avaient caché, mais voici que tu es moins avisée que Ménélaos, femme ! À moins que tu ne quittes ce lieu, celui-ci sera tué à ta place. Donc, choisis, ou de mourir, ou de voir cet enfant périr à cause de tes outrages envers moi et envers ma fille.

ANDKOMAKHÈ.

Ô Renommée, Renommée, à des milliers de mortels qui n’étaient rien tu apportes une brillante existence ! J’estime heureux ceux qui doivent l’honneur de leur nom à la vérité ; mais ceux qui ne le doivent qu’au mensonge, je pense qu’ils passent pour sages grâce au hasard. Est-ce toi qui, commandant aux plus vaillants des Hellènes, as enlevé autrefois Troia à Priamos, lâche que tu es ? Toi, qui, d’après les paroles de ta fille encore enfant, montres une telle arrogance, et qui luttes contre une malheureuse femme esclave ? Je ne te juge ni digne de Troia, ni vainqueur de Troia. Il en est qui brillent au dehors et sont tenus pour sages, mais qui, au dedans, sont tels que tous les autres hommes, à moins qu’ils ne l’emportent par les richesses, car cela est toujours très puissant. Ménélaos, allons ! cessons ces discours. Si je suis tuée par ta fille, si elle amène ma mort, elle ne pourra fuir l’expiation de ce meurtre ; et, devant tout le peuple, toi aussi, tu en seras coupable, car ta complicité t’accablera. Ou j’échapperai à la mort, et tu tueras mon fils. Mais comment son père supportera-t-il d’une âme égale la mort de son fils ?