Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/115

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vraies, et ne suis point un homme faux. Depuis longtemps déjà, depuis longtemps, tu aurais dû venir, et secourir cette terre, et repousser loin de Troia les lances argiennes. Tu ne diras pas que, n’étant point appelé, tu n’as pu venir à notre aide et avoir souci de nous. Quel héraut, quelle députation de Phryges ne sont pas allés te supplier de sauver cette Ville ? Que de présents ne t’avons-nous pas envoyés ! Mais, bien que notre parent et Barbare, tu nous as livrés aux Hellènes, nous Barbares aussi, autant qu’il était en toi. Cependant, par cette main, j’ai fait de toi un Roi puissant, quand tu n’avais que peu de pouvoir, alors qu’autour du mont Pangaios et des champs Paioniens, m’étant rué contre les plus braves des Thrèkiens, je brisai leurs boucliers et te livrai un peuple soumis. Pour toi, foulant toute gratitude aux pieds, tu viens tardivement en aide à tes amis accablés de travaux ! Et ceux qui ne sont pas de notre race sont depuis longtemps ici. Les uns gisent morts sous les tertres amoncelés, gage de leur fidélité à cette Ville. Les autres, en armes, debout près de leurs chars et de leurs chevaux, subissent courageusement les souffles glacés ou le feu ardent de Hèlios, et ils ne sont pas couchés sur les lits des festins, buvant à longs traits comme toi. Et, afin que tu saches la franchise de Hektôr, je te reproche cela, et je te le dis en face.

RHÈSOS.

Tel je suis aussi. Je parle droit, et ne suis point un homme faux. Plus que toi, loin de cette terre, j’avais le foie rongé de douleur et d’indignation ; mais la nation Skythique, au moment où je voulais le plus ardemment faire route pour Ilios, m’a fait la guerre. J’étais venu sur