Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/28

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fils de Pèleus ; et tu m’as amenée, sur un char, et par ruse, à des noces sanglantes ! — Et moi, les yeux couverts de voiles légers, je ne pris point dans mes bras ce frère qui maintenant est mort, et je ne donnai point de baiser à ma sœur, par pudeur, car je me rendais dans la demeure de Pèleus ; et je retardais mes nombreuses caresses pour un autre temps, quand j’eusse été de retour dans Argos. Orestès ! ô malheureux, si tu es mort, de quelle belle destinée, de quels biens paternels n’as-tu pas été privé ! Mais je n’approuve pas les sentences de la Déesse. Si quelque mortel a été souillé d’un meurtre ou d’un enfantement, ou s’il a touché un cadavre, elle le repousse de l’autel comme impur, et elle se réjouit de victimes humaines ! Jamais Lètô, l’épouse de Zeus, n’a pu enfanter une fille aussi insensée. Je regarde comme incroyable le festin offert aux Dieux par Tantalos ; ils n’ont pu se plaire à manger un enfant ! Les habitants de cette terre, étant eux-mêmes des tueurs d’hommes, ont prêté aux Dieux, je pense, leur propre férocité, car je ne crois pas qu’aucun des Daimones soit cruel.




LE CHŒUR.
Strophe I.

Bleus, bleus flots de la mer que traversa autrefois Io, aiguillonnée par le Taon, quand, d’Argos au Pontos Euxeinos, elle passa de l’Europa en terre Asiatique, quels sont ceux-ci qui, ayant quitté les eaux de l’Eurotas aux roseaux verdoyants, ou le cours sacré de Dirka, sont venus sur cette terre inhospitalière où la divine jeune fille souille