Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/22

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 mon fils, seul et dernier espoir de sa famille (06), qui habite la Thrace, couverte de frimas, sous la garde d’un ancien ami.

[83] Quelque chose de nouveau se prépare : à nos accents lamentables vont se joindre de nouvelles lamentations. Non, jamais mon âme ne fut en proie à une horreur, à un effroi si continu. Esprit divin d’Hélénus ou de Cassandre !… ô Troyennes, où sont-ils, pour m’expliquer mes songes ? J’ai vu une biche tachetée, déchirée par la griffe sanglante d’un loup, et violemment arrachée à mes genoux ; spectacle digne de pitié ! Autre sujet de terreur : au-dessus de son tombeau est apparue l’ombre d’Achille ; il demandait comme prix de ses exploits une de nos infortunées Troyennes. Loin de ma fille, ô dieux, loin de ma fille un pareil malheur ! écartez-le, je vous en conjure.

LE CHŒUR, composé de Troyennes captives.

[98] Hécube, j’accours en hâte vers toi ; j’ai quitté les tentes où le sort a fixé ma servitude, depuis que, chassée d’Ilion par l’épée des Grecs, je suis devenue leur triste captive. Hélas ! je ne viens point soulager tes souffrances ; chargée du poids d’une nouvelle accablante, je viens comme messagère de malheurs. L’assemblée entière des Grecs a résolu, dit-on, d’immoler ta fille aux mânes d’Achille. Tu sais que sur sa tombe il est apparu couvert de ses armes d’or : il a arrêté les navires qui déjà fendaient les ondes, et tendaient les cordages déployés pour les voiles. Il s’écrie : Quoi ! vous partez, enfants de Danaüs, et vous laissez mon tombeau sans offrande ! Aussitôt l’orage de la