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Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/433

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et, une fois maître de Troie (car j’en viens à tes derniers exploits), quand cette femme est retombée entre tes mains, tu ne l’as pas fait mourir. À peine a-t-elle découvert son sein à ta vue, le glaive vengeur est tombé de tes mains, tu as reçu ses baisers, tu as comblé de caresses un monstre souillé de vices[1], ô le plus lâche des hommes, vil esclave de l’amour ! et tu viens dans la maison de mes enfants exercer tes fureurs en leur absence, et tu viens égorger lâchement une femme infortunée et un faible enfant ! Mais sache que, sa naissance fût-elle encore plus illégitime[2], il te prépare de cruels repentirs à toi et à ta fille. Souvent un sol aride l’emporte sur une terre bien engraissée, et bien des bâtards valent mieux que les enfants légitimes. Emmène ta fille. Il vaut mieux s’allier à l’homme pauvre et vertueux, qu’à celui qui unit le vice à l’opulence. Pour toi, je te méprise.


le chœur

Les contestations d’abord les plus modérées engendrent de violentes disputes parmi les hommes ; aussi le sage évite d’entrer en discussion avec ses amis.

Ménélas

Que penser de la sagesse des vieillards, et de ceux dont la Grèce estime le jugement ? Quoi ! Pélée, toi, fils d’un héros illustre, allié à ma famille, tu profères des paroles déshonorantes pour toi-même et injurieuses pour moi ; et cela pour une esclave barbare, que tu aurais dû renvoyer par delà le Nil, par delà le Phase : et moi, je devais t’y exhorter sans cesse, car c’est une femme de l’Asie, terre jonchée des cadavres des Grecs ; et elle est complice

  1. Grec : « Une chienne qui t'avait trahi. »
  2. Grec : « Fût-il trois fois bâtard. »