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Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/459

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NOTICE SUR LES SUPPLIANTES.


Les Suppliantes sont la suite des Phéniciennes. Les sept chefs argiens étant morts sous les murs de Thèbes, leurs mères ne purent obtenir des Thébains la restitution de leurs corps, auxquels elles voulaient donner la sépulture. Elles vinrent alors implorer l’intervention de Thésée, roi d’Athènes. Elles s’adressent d’abord à se mère Éthra, qu’elles rencontrent à Éleusis, où elle offrait un sacrifice à Cérès. Ces mères suppliantes, qui, avec les femmes et les enfants des guerriers argiens, composent le Chœur, ont fourni le titre de la pièce.

Thésée se rend à leurs prières, et réclame les cadavres des chefs restés sans sépulture. Sur le refus des Thébains, il marche contre eux à la tête d’une armée ; et, à la suite d’une éclatante victoire, il rapporte ces corps, auxquels il fait rendre les derniers devoirs. Evadné, veuve de Capanée, un des sept chefs, se précipite dans le bûcher de son époux. La cérémonie funèbre prêtait à la pompe du spectacle, et s’accordait avec le ton solennel et religieux qui règne d’ailleurs dans toute la pièce.

On voit qu’il s’agit encore ici de la religion des tombeaux, sujet qui revient si fréquemment dans les tragédies grecques. Thésée se montre ici le défenseur de la religion violée. La privation des honneurs dus aux morts était regardée à la fois comme une calamité et comme une honte pour les familles. Ce sentiment était sans doute fortifié par la croyance que les âmes de ceux qui ne recevaient pas la sépulture erraient un temps indéfini sur les bords du Styx.

Mais outre le caractère religieux répandu sur toute cette tragédie, elle avait encore un autre caractère par lequel elle ne devait pas moins attacher le public d’Euripide : c’était une pièce essentiellement politique. On sait quelle importance les anciens attachaient à tous les souvenirs de leur histoire. Ainsi dans Hérodote (IX, 27), les Athéniens, à propos d’une question de préséance, rappellent un de ces souvenirs : « Dans le temps où tous les Ar-