Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/173

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hymne funèbre sur les malheurs d'ilion. Je vais faire entendre un chant en l'honneur de Troie; je dirai comment ce colosse porté sur quatre pieds a causé la ruine de ma patrie, et m'a soumise au pouvoir des Grecs, lorsqu'ils laissèrent aux portes de la ville le cheval harnaché d'or, garni de guerriers, et poussant dans les airs un long frémissement : du haut des remparts troyens le peuple s'écrie : « Allez, au terme de vos longues épreuves, introduisez dans nos murs l'offrande sacrée faite à la fille de Jupiter. » Parmi nos jeunes guerriers, parmi nos vieillards en est-il un seul qui ne se mette à l'œuvre? Tous s'encouragent, par leurs chants d'allégresse, à s'emparer de la fatale machine destinée à nous perdre.

Tout le peuple phrygien se précipite aux portes, armé de torches ravies aux pins de l'Ida, pour offrir à la déesse ce monument de l'art perfide des Grecs, fléau de la Dardanie, qui devait nous mériter la protection de la vierge immortelle. Aussitôt, des cordages l'entourent comme un vaisseau qu'on veut mettre en mer ; on le traîne dans nos murs, jusqu'au temple de Pallas, si fatal à ma patrie. A la suite de ces joyeux travaux, la nuit nous avait enveloppés de ses ombres; les sons de la flûte libyenne des Phrygiens se mêlaient aux, voix, et les jeunes vierges, frappant la terre en cadence, faisaient entendre leurs chants d'allégresse. Dans les maisons les flambeaux répandaient leur sombre lueur pendant ces réjouissances.

Et moi, au sein du foyer paternel, je célébrais par mes danses la fille de Jupiter, Diane, habitante des montagnes. Tout à coup une clameur homicide répandue à travers la ville remplit les demeures des Troyens ; l'enfant timide s'attache de ses mains tremblantes à la robe de sa mère. Mars (35) s'élance de la machine insidieuse, guidé par la divine