Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/317

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La soirée était d’une beauté ravissante, et la fraîcheur que nous goûtions sur cette plate-forme était si délicieuse, que nous priâmes notre domestique d’y établir nos lits comme il pourrait, parce que nous désirions y passer la nuit. Tout était prêt, et nous étions sur le point de nous coucher, que les curieux, toujours à leur poste, sur le toit et parmi les arbres, paraissaient fort peu disposés à descendre. Nous fûmes obligés de faire éteindre toutes les lanternes pour les décider à retourner chez eux. En abandonnant leurs observatoires, ils se disaient les uns aux autres : Ces hommes sont comme nous. — Pas tout à fait, s’écria l’un d’eux, le diable de petite taille a les yeux très-gros, et le grand a un nez très-pointu : j’ai remarqué cette différence.

Le lendemain maître Ting arriva sur le théâtre qu’il était à peine jour. Il se mit en devoir de nous réveiller en exécutant des roulements sur un énorme tambour placé à un angle de la scène, et qui servait dans la musique des pièces de théâtre. Après avoir bien tambouriné, il s’avisa de nous donner une petite représentation à sa façon ; il se plaça au milieu de la scène, prit une pose dramatique, et, après avoir chanté un morceau avec grand accompagnement de gestes, il entreprit, à lui tout seul, un dialogue très-animé, pendant lequel il changeait de voix et de place chaque fois qu’arrivait le tour de son interlocuteur. Quand le dialogue fut terminé, il voulut se passer la fantaisie de faire le saltimbanque. — Maintenant, nous dit-il, regardez bien, je vais exécuter des tours de souplesse ; et aussitôt le voilà sautant, gambadant, pirouettant et cabriolant avec fureur. Pendant qu’il était au plus fort de ses évolutions,