Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/435

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sur le plus vaste empire du monde, et sur des populations qui sont, quoi qu’on en dise, extrêmement mobiles et remuantes. Il a fallu une politique bien habile, souple et vigoureuse en même temps, pour obtenir un semblable résultat ; mais tout fait présumer que ces mêmes moyens, qui ont peut-être le plus contribué à établir la puissance des Tartares mantchous, serviront à les jeter bas.

Ces étrangers, ces barbares, que le gouvernement de Péking veut avoir l’air de mépriser parce qu’il les redoute beaucoup, finiront par s’impatienter devant ces portes obstinément fermées sur eux ; un beau jour ils les feront voler en éclats, et trouveront derrière un peuple innombrable, il est vrai, mais désuni, sans force de cohésion, et à la merci de quiconque voudra s’en emparer en tout ou en partie.

Le vénérable mandarin de Song-tche-hien, ce bon Chinois des temps antiques, nous fit entendre de nobles gémissements sur la décadence de sa patrie ; il nous disait : Depuis que nous mettons en oubli les saintes traditions de nos ancêtres, le ciel nous abandonne ; ceux qui regardent attentivement la marche et les tendances des événements, ceux qui observent combien est grand l’égoïsme des magistrats, et combien est profonde la dépravation du peuple, éprouvent un sombre et douloureux pressentiment ; c’est que nous sommes à la veille d’un immense bouleversement. Comment s’opérera cette révolution pressentie par un grand nombre ? l’impulsion viendra-t-elle du dedans ou du dehors ? Nul ne le sait ; personne ne saurait le prévoir. Ce qu’il y a de certain, c’est que, depuis quelques an-