Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/473

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de fusil, il est moins nécessaire de viser avec le bout du canon que de bien regarder l’objet, absolument comme lorsqu’on veut frapper un but en lançant une pierre.

Le tir des petites coulevrines fut, sans comparaison, ce qu’il y eut de plus divertissant pendant la parade. Nous avons dit qu’elles n’avaient pas d’affût et qu’elles étaient portées solennellement par deux soldats, ayant chacun un bout de la coulevrine appuyé sur l’épaule gauche, et retenu par la main droite. On ne saurait s’imaginer rien de plus pittoresque que la figure de ces malheureux quand on mettait le feu à la machine ; ils tenaient à montrer de la sérénité et de la grandeur d’âme ; on voyait qu’ils faisaient des efforts pour être impassibles ; mais la position était si critique, et les muscles de leur face prenaient des formes tellement inusitées, qu’il en résultait des grimaces étonnantes. Le gouvernement impérial, dans sa paternelle sollicitude à l’égard de ces infortunés porte-coulevrines, a prescrit que, avant l’exercice, on leur tamponnerait soigneusement les oreilles avec du coton ; quoique placé à une distance assez éloignée, il nous fut facile de constater qu’on ne leur avait pas épargné la précaution. On comprend qu’avec un tir de cette façon il ne doit pas être très-facile de viser ; aussi s’en met-on peu en peine, et le boulet s’en va où il peut. Pendant les exercices on a la prudence de ne tirer jamais qu’à poudre.

Lorsque la guerre a lieu en Tartarie ou dans les pays où l’on trouve des chameaux, il paraît que ces quadrupèdes sont chargés de mettre les coulevrines en batterie en les portant entre leurs bosses. Dans une série de tableaux représentant les campagnes de l’empereur Khang-hi dans le pays des Œleuts, nous avons rencontré