Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/100

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un ton déclamatoire, pendant que raille commentaires plus satiriques, plus impitoyables que le texte, se produisent de toutes parts au milieu des éclats de rire.

Quelquefois ce moyen d’opposition devient une forme de récompense nationale instituée en faveur des mandarins qui ont su se rendre populaires ; alors l’éloge pompeux et emphatique remplace l’épigramme, et l’idole de la multitude ne manque jamais d’être comparée aux saints personnages les plus fameux de la vénérable antiquité. Il est à remarquer, cependant, que les Chinois réussissent toujours moins dans l’apologie que dans la satire, et que leurs affiches savent beaucoup mieux insulter que louer leurs mandarins.

Les Chinois n’ont pas l’habitude de se tenir toujours aussi courbés qu’on se l’imagine sous la verge de leurs maîtres. On peut dire, et c’est une justice à leur rendre, qu’ils respectent ordinairement l’autorité ; mais, lorsqu’elle est par trop tyrannique, ou simplement tracassière, ils savent quelquefois se redresser devant elle avec une énergie irrésistible et la faire plier. Pendant que nous traversions une des provinces de l’ouest, nous arrivâmes un jour dans une ville de troisième ordre nommée Ping-fang, où nous trouvâmes le peuple entier en mouvement, avec des airs qu’on n’est pas accoutumé à lui trouver. Voici ce qui venait de se passer :

L’administration supérieure avait nommé à la préfecture de cette ville un mandarin dont les habitants ne paraissaient pas se soucier ; on savait que, dans le district qu’il venait de quitter, son administration avait été arbitraire et tyrannique, et que le peuple avait eu beaucoup à souffrir de ses injustices et de ses rapines. La