Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/102

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féliciter de son heureux voyage. Les notables se prosternèrent, conformément aux rites, devant leur nouveau préfet, puis l’un d’eux, prenant la parole, lui annonça, avec une politesse exquise et une grâce infinie, qu’ils venaient, au nom de la ville et de ses dépendances, pour lui signifier qu’il devait se remettre en route immédiatement, et s’en retourner d’où il était venu, parce que, absolument, on ne voulait pas de lui. Le préfet, brusquement désillusionné, essaya de caresser d’abord, puis d’intimider ses chers administrés ; mais il ne fut, en cette circonstance, comme s’expriment les Chinois, qu’un tigre de papier. Le chef des notables lui dit, avec beaucoup de calme, qu’on n’était pas venu pour délibérer ; que la chose avait été déjà faite, et qu’il était bien arrêté qu’on ne le laisserait pas coucher dans la ville ; et, afin de ne laisser aucun doute à ce pauvre magistrat sur leurs véritables intentions, il ajouta qu’un palanquin l’attendait devant le tribunal ; que la ville payerait les frais du voyage ; et que, de plus, elle lui fournirait une brillante escorte pour le reconduire jusqu’à la capitale de la province, et le remettre sain et sauf entre les mains du vice-roi.

Il est incontestable qu’on ne saurait mettre quelqu’un à la porte avec plus de galanterie. Le préfet feignit pourtant de faire encore le difficile ; mais une immense multitude s’était rassemblée aux alentours du tribunal ; les clameurs qu’elle faisait entendre et qui paraissaient être d’une nature peu bienveillante, avertirent le préfet qu’il ne serait pas prudent de résister davantage. Il dut donc céder à sa destinée et se résigner à rebrousser chemin. Les notables l’accompagnèrent avec beaucoup d’égards