Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/115

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divin législateur Manou, est comme le soleil ; il brûle les yeux et les cœurs, il est air et feu, soleil et lune ; aucune créature humaine ne saurait le contempler ; mais cet être supérieur ne peut lever de taxe sur un brahmane, quand lui-même mourrait de faim, ni faire un marchand d’un laboureur, ni enfreindre les moindres dispositions d’un code qui passe pour révélé et qui décide des intérêts civils comme des matières religieuses. L’empereur de la Chine est le Fils du Ciel, et, quand on approche de son trône, on frappe neuf fois la terre du front ; mais il ne peut choisir un sous-préfet que sur une liste de candidats dressée par les lettrés, et, s’il négligeait, le jour d’une éclipse, de jeûner et de reconnaître publiquement les fautes de son ministère, cent mille pamphlets autorisés par la loi viendraient lui tracer ses devoirs et le rappeler à l’observation des usages antiques. On ne s’aviserait pas, en Occident, d’opposer de telles barrières à la puissance d’un prince ; mais il n’en est pas moins vrai qu’une foule d’institutions semblables doivent, quelles qu’en soient l’origine et la nature, mettre une digue aux caprices de la tyrannie, et que le pouvoir ainsi circonscrit est loin d’être sans frein et sans limites et peut difficilement passer pour despotique.

« J’ai parlé d’institutions, et ce mot, tout moderne et tout européen, peut sembler bien pompeux et bien sonore, quand il s’agit de peuples grossiers qui ne connaissent ni les budgets, ni les comptes rendus, ni les bills d’indemnité. Il ne saurait être ici question d’un de ces actes improvisés par lesquels on notifie à tous ceux qu’il appartiendra, qu’à dater d’un certain