Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/124

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En suivant cette route de Han-tchouan, sanctifiée par les souffrances du vénérable Perboyre, les détails de ce long martyre, que nous avions eu la consolation de raconter nous-même jadis à nos amis d’Europe, se représentaient à notre mémoire et pénétraient notre âme d’une douce émotion, nos yeux étaient mouillés de larmes ; mais les pleurs que l’on verse au souvenir des tourments d’un martyr sont toujours pleins de suavité.

Nous suivîmes pendant deux heures des sentiers étroits et tortueux qui tantôt serpentaient à travers des collines de terre rouge, où croissaient en abondance le cotonnier et la plante à indigo, et tantôt glissaient dans les vallons le long de vertes rizières. Nous ne tardâmes pas à apercevoir le lac Ping-hou, dont la surface, d’un bleu mat, et légèrement ridée par une petite brise, réfléchissait les rayons du soleil, comme par d’innombrables pointes de diamant. Trois bateaux préparés à l’avance nous attendaient au rivage. Le convoi s’embarqua promptement ; on hissa de longues voiles en bambou, plissées comme des éventails, et nous partîmes. Plusieurs rameurs suppléaient à l’insuffisance du vent, qui n’était pas encore formé ; vers midi, il obtint plus de force et de régularité, nous prit par le travers et nous poussa avec assez de rapidité sur la vaste surface de ce lac magnifique. Nous rencontrâmes des barques de toute forme et de toute grandeur, qui transportaient des voyageurs et des marchandises, plusieurs étaient destinées à la pêche et se faisaient remarquer par de noirs filets suspendus au grand mât. Ces nombreuses jonques, se croisant dans tous les sens avec leurs voiles jaunes et leurs pavillons bariolés, le murmure vague et indéterminé qui