Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/454

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de pétards et musique de tam-tam. Dans la soirée, nous avions l’habitude de rendre visite à nos compagnons de voyage en passant d’un bord à l’autre. Le capitaine de la frégate était un vieux marin originaire du Fokien. On ne pouvait guère entretenir avec lui de longues conversations, car il ne parlait que l’idiome de sa province, auquel il entremêlait parfois quelques expressions chinoises plus ou moins défigurées. Après avoir donc échangé beaucoup de gestes et de pantomimes, nous montions sur la jonque du mandarin civil. Celui-ci, Pékinois pur sang, avait des manières élégantes et raffinées, comme il convient à un homme issu de la capitale du royaume des Fleurs. À son langage on reconnaissait tout de suite un citoyen de la métropole du Céleste Empire. Mais, par malheur, il aimait peu à causer. Sa physionomie, toujours pleine de tristesse et de mélancolie, dénotait que son âme était en proie à de vifs et profonds chagrins. Nous dûmes respecter sa douleur, et nous contenter de lui faire des visites courtes et de pure cérémonie.

Le matin, aussitôt que le jour paraissait, un coup de canon annonçait le moment du départ et nous recommencions notre charmante promenade. Les chemins de fer, les bateaux à vapeur, les voitures de poste, tous nos moyens prompts et rapides de locomotion sont assurément des inventions merveilleuses, que tout le monde admire et qu’on ne manque jamais d’apprécier beaucoup, quand on est pressé de se transporter quelque part ; mais il faut convenir que ces voyages accélérés sont entièrement dépourvus d’intérêt. On pourrait parcourir de cette façon la terre entière sans avoir aucune