Aller au contenu

Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui battait à lui rompre la poitrine, c’est mal à vous de vous jouer ainsi de moi…

— Madeleine ! s’écria Firmin en tombant à ses genoux et en saisissant ses mains avec ivresse, Madeleine, de quoi m’accusez-vous donc là ? Ne vous ai-je pas prouvé que je vous respectais à l’égal d’aucune autre femme ? Vous ai-je trompée, Madeleine ?

La pauvre fille secoua la tête en souriant d’un sourire heureux et triste à la fois, puis elle se rapprocha de Firmin :

— Je ne vous accuse pas, monsieur de Lansac, je m’étonne et je vous questionne, voilà tout.

— Eh bien ! s’écria Firmin avec transport, ne me comprenez-vous pas ? ne m’avez-vous donc pas entendu ? Je vous prends pour ma femme, Madeleine…

— Mais c’est impossible, vous le savez !… Par quel miracle cela pourrait-il s’opérer ?… Et qui aurait fait ce miracle ?

— Connaissez-vous Corydon, un vieux nègre de cette habitation ?

— Corydon ! murmura Madeleine en rougissant, il m’avait promis un quimboix

— Qui vous rendrait heureuse, n’est-ce pas ? Il l’a trouvé… il me l’a donné. C’est un grand sorcier que ce Corydon, allez !… Si bien, chère Madeleine, que rien aujourd’hui ne peut plus nous empêcher de nous unir…

— Je ne vous comprends pas encore.

— C’est une histoire que je vous dirai plus tard, chère enfant… Vous voulez bien toujours que j’aspire à vous, Madeleine ?…

Pour toute réponse, elle laissa tomber sa tête sur l’épaule de Firmin.

— Où est Jérémie ? demanda le jeune créole.

— Il est aux cannes, et ne reviendra pas avant deux heures d’ici.