Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À chaque trait qu’il détaillait de la personne de Madeleine, Firmin poussait des exclamations d’admiration.

— Ah çà ! mon enfant, lui dit-il tout à coup, êtes-vous bien vous ?

— Et qui donc, Monsieur, veut-il que je sois ? répondit Madeleine.

— Je ne sais, ma foi ! une duchesse, une marquise tout au moins, à coup sûr ; mais certes, non pas la fille d’un mulâtre, économe sur une habitation.

— C’est pourtant ainsi, Monsieur, répondit Madeleine en rougissant légèrement.

— Votre mère vit-elle ?

— Je ne l’ai jamais connue ; elle mourut en me mettant au monde… Mais, pardon, Monsieur ; je réponds à vos questions et je ne songe pas à aller chercher la fin de votre souper.

— Rien ne presse, dit Firmin, en faisant un geste pour arrêter la jeune fille, rien ne presse, mon enfant, et je trouve un charme très-grand à causer avec vous…

— Monsieur est bien bon…

— Et qui vous a élevée ? Est-ce Jérémie ? Je lui en ferai mon compliment.

— Mon père m’a enseigné ce qu’il savait : à aimer le bon Dieu et notre maître, à lire un peu, et à écrire aussi bien qu’il a pu ; le reste je l’ai appris de moi-même.

— Et qu’avez-vous appris ainsi de plus que ce que vous dites là ?

— À broder, à coudre… pour l’avoir vu faire par ces dames… Il fallait bien remplir le temps, puisque mon père n’a jamais voulu souffrir que je m’occupasse des travaux de la case.

Madeleine avait soutenu ce dialogue sans trop de niaise timidité, mais en observant toujours la distance que les