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Page:Eyraud - Voyage à Vénus.djvu/243

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VOYAGE À VÉNUS

beaucoup aujourd’hui, — ou d’un tableau chargé de couleurs éclatantes, habilement contrastées, mais sans contours et sans dessin. Loin de s’attacher à ces subtilités de détail et de traduire le livret vers par vers, la musique doit s’animer de ce souffle mélodique qui constitue son essence même, et ne s’inspirer que du sens le plus général des paroles.

— Quant aux paroles, lui dis-je, l’orchestration de nos compositeurs les noie dans ses flots tumultueux. De temps à autre, dans les opéras français qui se jouent sur toute notre planète, on entend rimer manoir et noir, ombre et sombre, si l’on chante une ballade ; — yeux et feux, âme et flamme, dans un chant d’amour ; — vin et jus divin, bouteille et vermeille, dans les chœurs à boire ; — et c’est tout.

— C’est bien assez à mon sens ; non que je veuille sacrifier les vers aux fantaisies et aux violences de l’orchestration, mais parce que leur rôle doit être ici tout à fait secondaire. La Musique et la Poésie sont femmes, et deux femmes ne s’entendent jamais bien quand elles sont également jolies. Il faut, pour qu’elles s’accordent parfaitement, que l’une s’efface devant l’autre et ne lui dispute aucun hommage. Ainsi pour la vraie poésie : il suffit d’un léger accompagnement qui en marque le rhythme.

— Les anciens peuples de la Terre ne manquaient