Aller au contenu

Page:Eyraud - Voyage à Vénus.djvu/250

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
242
VOYAGE À VÉNUS

blanche, pérorant d’une voix grave, sur des choses graves avec des aphorismes graves que charrie abondamment sa conversation, comme une rivière charrie des glaçons. Ces vénérables Nestors de la bourgeoisie forment un excellent repoussoir à l’animation des causeries, à la beauté des femmes et à l’éclat papillotant des toilettes, jusqu’au moment où leur humeur lugubre menaçant de devenir contagieuse, on les interne dans la pièce voisine, et on les rive à quelque table de whist ou de bouillotte.

Loin d’avoir ces prétentions à la gravité, la plus belle, la plus indolente et la plus dépensière moitié du genre humain affecte généralement des airs de vivacité et d’étourderie juvéniles, dont l’âge contredit quelquefois la convenance et l’à-propos. Rien n’égale non plus l’afféterie que la plupart de nos grandes dames apportent dans leurs jeux de physionomie et leurs inflexions de voix qu’elles se complaisent à moduler en doux roucoulements de tourterelle. Chacune, du reste, adopte obstinément le maintien qui la flatte le plus. A-t-elle une jolie main ? elle ne cesse de jouer avec ses cheveux ou de chiffonner son mouchoir ; de beaux bras ? elle a constamment besoin de s’accouder ; de blanches dents ? elle rit toujours. Je ne parle pas des artifices préalables dont le cabinet de toilette a caché le