Page:Félix-Faure-Goyau - La vie et la mort des fées, 1910.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
4
LA VIE ET LA MORT DES FÉES

nir et leur imposaient les lois du destin. Les Hâthors étaient jeunes et belles. Leur visage ne se troublait jamais pour les malheurs qu’elles avaient à prévoir. Elles recevaient l’enfant et assistaient la mère, telle la fée Abonde de notre moyen âge, mais la fée Abonde visitait les pauvres gens, et les Hâthors ne frayaient qu’avec les grands de la terre. Ce n’était point qu’elles ne s’occupassent des autres, mais les grands seuls étaient admis à les entendre prononcer les arrêts du destin. La foule savait que, selon leurs décrets, les hommes nés tel ou tel jour étaient voués à telle ou telle mort. « Quiconque nait en ce jour meurt de la contagion — quiconque naît en ce jour meurt par le crocodile — quiconque naît en ce jour meurt de vieillesse — quiconque naît en ce jour meurt dans la vénération de tous ses gens. » Contre les rigueurs des Hâthors les hommes pouvaient user de prudence ou de talismans. La philosophie des contes égyptiens laisse une certaine part à la liberté humaine et permet à chacun de lutter contre ses mauvais penchants, ou contre sa mauvaise santé. Mais, pour retardée qu’elle fût, l’heure fatale, prévue par les Hâthors devait forcément arriver. La féerie égyptienne était riche en prodiges, en métamorphoses, en formules magiques, en incantations.

Voici venir encore, à l’avant-garde de la pompe féerique, les nymphes et les dryades de la mythologie classique, et puis un personnage plus austère, plus inquiétant, avec lequel les fées ont d’étranges rapports. Le Destin, la redoutable ἀνάγκη des Grecs, l’inflexible fatum des Romains, semble s’être à la longue morcelé, dédoublé, multiplié. Et les fées en furent comme la monnaie, jeunes et vieilles femmes, espiègles ou grincheuses, bienfaisantes ou malicieuses, convives