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PROLOGUE

empressées des festins de naissance ou de baptême. Sans sortir du monde réel, il y a, certes, des puissances amies ou hostiles autour du berceau de l’enfant, des hérédités anciennes ou de futures influences. Les fées en constitueraient-elles la personnification ?

Ausone, qui avait un petit coin de féerie dans son cerveau lorsqu’il rêvait au parfum des étoiles, nomme les tria fata auprès des trois Grâces. Ces mêmes tria fata sont citées par Procope. Ainsi commença la vie des fées : dans cette lointaine époque, elles eurent parfois des collègues masculins, des fati, mais ceux-ci disparurent bien vite, tandis que les fées féminines se répandaient partout avec une grâce triomphante. Plus de grâce que de bonté, d’ailleurs : sur les trois fées, deux étaient bienfaisantes, mais la troisième se révélait redoutable. Ainsi la troisième Parque défaisait l’ouvrage de ses sœurs, et Carabosse ne serait peut-être qu’une variation d’Atropos.

La Scandinavie avait ses trois Nornes qui nous apparaissent aussi comme trois Destinées parentes des fées celtiques. Elles s’appelaient Urd (le Passé), Yerdandi (le Présent), Skuld (l’Avenir), et se tenaient près d’un puits. Le huitième livre de l’Edda renferme toute la doctrine de la Féerie. D’après ces légendes, un certain nombre de fées assistent à la naissance de chaque enfant et tracent les grandes lignes de sa vie. Il y en a de bonnes et de méchantes. Frigga, femme d’Odin, Freya, femme d’Oder, sont des reines entre les fées. Frigga demeure près de la fontaine du Passé ; Freya répand des larmes d’or. Nos imaginations modernes trouvent beaucoup de poésie dans ces emblèmes, mais rien ne nous dit que cette poésie fût la