Page:Félix-Faure-Goyau - La vie et la mort des fées, 1910.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
6
LA VIE ET LA MORT DES FÉES

même pour l’esprit des peuples primitifs. Le souvenir de Frigganous explique, peut-être, que dans tous les récits du moyen âge, les fées ne manquent pas de se montrer auprès d’une fontaine. Pourquoi Frigga voisine-t-elle avec la fontaine du Passé ? N’est-ce point parce que le miroir transparent des ondes nous présente seulement le reflet des choses, et que les ondes du passé nous présentent des souvenirs qui ne sont aussi que des reflets ? Puis ce serait d’une jolie ingéniosité de faire apparaître près de la source du Passé les fées qui révèlent les lois de l’avenir ; car les secrets de ce qui doit être dorment bien souvent dans les profondeurs de ce qui fut… Quant à Freya, la déesse aux larmes précieuses, déesse aux pieds de cygne, parente de la fameuse Mère l’Oye, nous croyons voir en elle une sorte de beauté mélancolique et pitoyable, elle a des affinités avec notre rêve.


II


Des faits réels, oubliés par l’histoire, perdus dans la nuit des temps, ou métamorphosés par la distance, vinrent peut-être se joindre à ces vagues et fantaisistes croyances. Le monde féerique est plein d’êtres bizarres : animaux qui parlent, géants épais, nains astucieux. Il est l’œuvre d’imaginations qui s’amusent à déformer l’aspect du monde, comme le font certains rêves, et sans y mettre plus de malice ; mais il n’est pas impossible, au moyen du reflet brisé ou dévié, de reconstituer la figure réelle de l’objet reflété. Sous tous les caprices du miroir, n’y aurait-il jamais