est transformé. Alcine a caché ses armes. Il revêt les étoffes qu’elle a tissées et brodées pour lui. Le portrait que l’Arioste nous peint de Roger pourrait être signé d’un peintre du temps : « Il jouissait de la matinée fraîche et sereine, au bord d’une belle rivière qui descendait d’une colline, vers un lac limpide et riant. Tout son vêtement était mol et délicieux pour la paresse et la volupté, car, de ses mains, Alcine le lui avait tissé de soie et d’or, en un travail subtil. Un splendide collier de riches pierreries lui descendait du cou jusqu’à la poitrine ; et à chacun de ses bras toujours virils tournait un cercle brillant. On lui avait percé l’une et l’autre oreille d’un léger fil d’or en forme d’annelet, et deux perles y étaient suspendues, telles que n’en eurent jamais les Arabes, ni les Indiens. Ses cheveux étaient imprégnés des parfums les plus suaves. Toute son attitude était amoureuse… ». Qui dirait que plus d’un chevalier de Charles VIII, Louis XII et François Ier, attardé en Italie, ne se laissa pas ainsi amollir en subissant le prestige ensorcelant des villes trop douces !
Bradamante, désolée de l’absence de Roger, va consulter le tombeau de Merlin, et, grâce à Melissa, le désenchantement s’opère. Alcine apparaît à Roger, non plus avec les prestiges et la séduction de son art féerique, mais telle qu’elle est en réalité, laide, vieille, difforme, hideuse. Il n’a plus qu’une idée, celle de fuir la fée décevante. La transformation d’Alcine est empruntée au Purgatoire de Dante. Comment cette blonde fée aux yeux noirs est-elle devenue si rapidement une horrible vieille ? L’Arioste veut-il nous donner simplement à entendre que les artifices de la parure, en s’évanouissant, donneraient de semblables surprises ? Ou veut-il nous signifier