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LES JARDINS FÉERIQUES DE LA RENAISSANCE ITALIENNE

Graziano n’aura que peu de succès lorsqu’il composera pour elles, après tous les Rolands amoureux, furieux et furibonds, après la caricature de l’Arétin, une légende de Roland sanctifié, Orlando santo.


VII

LA CONVERSION D’UNE FÉE : ARMIDE ET LE TASSE


Un suprême rayon de poésie se pose encore sur Ferrare, illuminant le front dolent du Tasse. Fils du poète auquel on doit l’Amadis italien, et d’une mère, belle, recueillie, mélancolique, l’enfant de Bernardo Tasso et de Porzia de Rossi était né sur le rivage étincelant de Sorrente, rivage destiné aux suaves harmonies, puisqu’il devait inspirer à Lamartine des vers qui sont une caresse pour notre âme. Les sites les plus radieux ne peuvent qu’enchâsser la tristesse de la destinée humaine. Porzia, dans la gloire de sa nouvelle maternité, penchée sur son Torquato et sur la sœur aînée de celui-ci, la petite Cornélia, déplorait l’absence de son mari qui voyageait pour le compte du prince de Salerne. Elle veilla sur les premières études de son fils, puis la vie s’assombrit encore ; Torquato, séparé de sa mère, suivit son père exilé. Ce que fut la douleur de l’enfant, nous pouvons le concevoir, si nous songeons que, plus tard, au milieu de ses épreuves, il commençait à la prison de Sainte-Anne un poème demeuré inachevé, tout plein des nostalgiques chagrins de son jeune âge, de l’époque où il fut privé des caresses maternelles. Qui sait si cette première blessure imprimée