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CHAPITRE XIV

CARLO GOZZI ET LA FÉERIE VÉNITIENNE


L’Italie avait toujours accueilli les fées. La haute littérature, avec Bojardo et l’Arioste ; les contes amusants, aristocratiques ou populaires, innocents ou équivoques, avec Straparole et Gianbattista Basile, avaient été propices aux ébats de ces mystérieuses et fantaisistes personnes. Venise, qui s’en étonnerait ? leur fut spécialement hospitalière. En écrivant ce titre : la Féerie vénitienne, il me vient à l’esprit que, pour le justifier, je n’aurais qu’à parler de la ville réelle, telle qu’elle est. La féerie n’est-elle pas dans son silence, dans le glissement de ses gondoles, dans le cri de ses gondoliers, dans le reflet de ses canaux, dans l’architecture de ses palais, dans les lueurs de son ciel, dans ses matins de moire bleue, argentée, à peine frissonnante ; dans ses blonds et chauds crépuscules dont l’essence s’est fixée aux cadres des vieux peintres ?

Même au déclin de sa splendeur, quand les palais meurtris comme des roses fanées ou des feuilles