Page:Félix-Faure-Goyau - La vie et la mort des fées, 1910.djvu/343

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
331
LA FÉERIE ALLEMANDE : LES GRIMM

nuit tombe, et le Rhin coule en silence ; le sommet de la montagne brille des dernières clartés du couchant. La plus belle vierge est assise là-haut comme une apparition merveilleuse ; sa parure d’or étincelle ; elle peigne ses cheveux d’or. Elle peigne ses cheveux d’or avec un peigne d’or, et elle chante une chanson dont la mélodie est prestigieuse et terrible. Le marinier, dans sa petite barque, se sent tout pénétré d’une folle douleur ; il ne voit pas les gouffres et les rochers ; il ne voit que la belle vierge assise sur la montagne. Je crois que les vagues, à la fin, engloutissent et le marinier et la barque ; c’est Loreley qui a fait cela avec son chant. »

Quel est ce chant de Loreley qui conduit les bateliers à leur perte ? Quelle analogie a-t-il avec celui des antiques sirènes ? Est-ce à dessein que le poète néglige la victoire de la pitié dans le cœur féroce de Loreley ? Le pardon et la pitié triomphant de la vengeance, c’est la victoire du Christianisme. Serait-ce la moralité cachée du récit ?

Henri Heine s’occupa des ondines ; il imagina la plaisante aventure du beau chevalier faisant mine de dormir, alors que des ondines au voile blanc venaient le baiser au clair de lune. Il rêvait, sous les eaux, la vie de cités fantastiques pareilles à celles des vieilles légendes. Il chanta la rencontre de deux bizarres personnages : un ondin et une ondine sous les tilleuls d’un bal champêtre. La musique retentit sous les tilleuls ; c’est là que dansent les garçons et les filles du village ; il y a aussi deux personnages que nul ne connaît, ils sont sveltes et élégants… « Mon beau sire, à votre chapeau vert pendille certain lis qui ne croît qu’au fond de l’océan… Vous êtes un ondin, fils de la mer, vous venez pour séduire les