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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

Le spectacle de ce simple bonheur humain suffit à faire oublier aux fées tout l’orgueil de leur destin exceptionnel. Elles verront, sous une autre lumière, la vie humaine et la mort. Leur belle et triste reine boira, la première, le breuvage destiné à vaincre le pouvoir de la coupe d’immortalité. Zilla, voulant aussi redevenir mortelle, suivra son exemple ; les fées ont alors compris que la mort est une espérance.

Des fées apparaissent encore, dans les Contes d’une grand’mère.

George Sand était une authentique grand’mère lorsqu’elle les composa.

Elle avait connu toutes les exaltations et toutes les déceptions ; elle avait cru au bonheur s’épanouissant loin des contraintes et des disciplines ; elle avait divinisé la passion, rêvé la liberté de l’amour, prêché dans ses ouvrages de folles théories propres à égarer le cerveau de ses sœurs ; mais, penchée sur ses petites-filles, elle n’était plus qu’une grand’mère très douce et très tendre, et ce qu’il y avait de meilleur et de plus vrai dans sa vie, ce n’était point la part exceptionnelle : c’était, au contraire, la part commune à la majorité des femmes.

George Sand était donc une vieille dame aux magnifiques yeux noirs un peu éteints, qui aimait les arbres et les bêtes, et aussi les longues histoires que l’on raconte aux petits enfants. Elle avait toujours dû croire aux fées : n’y a-t-il point quelque trait d’elle dans cette petite Diane Flochardet qui est l’héroïne du Château de Pictordu ? Le jour vint où la future romancière douta que le bonhomme Noël descendît par les cheminées pour déposer des cadeaux dans les souliers des petits enfants… Hélas !