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LA FÉERIE ROMANTIQUE EN FRANCE

à travers son existence, beaucoup de doutes suivirent celui-ci, et de grandes vérités subirent, chez elle, le sort du bonhomme Noël.

Ses contes aux enfants ne retiennent aucun parfum de christianisme ; on supposerait qu’il n’est point de cloches projetant une ombre sur la douce terre berrichonne, ni de purs angélus égrenés sur la campagne. Les contes de George Sand, le Nuage rose ou les Ailes du courage, n’auraient pas trouvé place dans les Neiges d’antan de Mme Julie Lavergne ou dans quelque autre recueil de cette délicate et pensive conteuse, qui moissonne, au jardin du passé, des gerbes si pieuses et si touchantes.

Un souffle de paganisme se glisse dans le Château de Pictordu : un petit souffle très insinuant et presque imperceptible.

Pauvre George Sand ! Elle avait tant remué d’idées fausses, qu’il y en avait des bribes à chaque pli de sa robe, et que chacun de ses mouvements ne pouvait manquer d’en déplacer une ou deux qui voletaient autour d’elle et imprégnaient son atmosphère de leur influence. Elle s’était exaltée aux discours de Pierre Leroux ou de Michel de Bourges…

Son enthousiasme s’est démodé, comme leurs rêveries… Le suprême rayon de sa gloire lui viendra de ses amis les paysans, de la Petite Fadette ou de François le Champi ; mais toutes ces théories qu’elle croyait si belles, si justes, si neuves et si vivaces, sont aujourd’hui plus mortes que les feuilles de l’autre saison. Il est dangereux de vouloir être trop moderne : la pensée moderne est destinée à vieillir, et la jeunesse ne se renouvelle que pour les idées éternelles.

George Sand devait être une grand’mère déli-