Page:Fénelon - De l’éducation des filles. Dialogues des morts.djvu/156

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Achille. — Il est vrai ; mais la jeunesse serait charmante si on pouvait la rendre modérée et capable de réflexion. Toi, qui connais tant de remèdes, n’en as-tu point quelqu’un pour guérir cette fougue, ce bouillon du sang, plus dangereux qu’une fièvre ardente ?

Chiron. — Le remède est de se craindre soi-même, de croire les gens sages ; de les appeler à son secours, de profiter de ses fautes passées pour prévoir celles qu’il faut éviter à l’avenir, et d’invoquer souvent Minerve, dont la sagesse est au-dessus de la valeur emportée de Mars.

Achille. — Eh bien ! je ferai tout cela si tu peux obtenir de Jupiter qu’il me rappelle à la jeunesse florissante où je me suis vu. Fais qu’il te rende aussi la lumière, et qu’il m’assujettisse à tes volontés comme Hercule le fut à celles d’Eurysthée.

Chiron. — J’y consens ; je vais faire cette prière au père des dieux ; je sais qu’il m’exaucera. Tu renaîtras, après une longue suite de siècles, avec du génie, de l’élévation, du courage, du goût pour les Muses, mais avec un naturel impatient et impétueux ; tu auras Chiron à tes côtés ; nous verrons l’usage que tu en feras.