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Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/211

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XIII

À PARIS


Le lecteur se rappelle que Violette avait jeté avec une exaltation joyeuse :

— À Paris, monsieur l’abbé !

En effet, le soir même Violette, l’abbé Marcotte et Pascal prenaient la route de la Capitale.

Nous croyons utile d’interrompre ici notre récit pour mettre, aussi brièvement que possible, le lecteur au courant du genre de vie que menaient là-bas l’abbé Marcotte et Pascal.

L’abbé Marcotte, choisi comme chapelain du bataillon Saint-Louis, avait volontairement suivi nos braves Canadiens de l’autre côté de l’Atlantique. Il l’avait fait à titre gratuit, sans demander ou exiger la rémunération généralement accordée aux chapelains ou aumôniers.

Comme son âge avancé et sa santé délicate ne lui permettaient pas de vivre au milieu de nos soldats, il avait loué une petite maison de ferme perdue dans un petit bois et à l’abri d’une colline qui s’élevait à environ dix kilomètres des dernières tranchées de la ligne de feu.

De là, il se rendait presque chaque jour aux tranchées, administrant les secours de la religion, aidant aux transports et aux soins des blessés, et se rendant généralement utile partout là où ses services étaient requis.

Et, comme à Ottawa, Pascal tenait la maison.

Souvent il accompagnait l’abbé et, pour imiter l’exemple du bon et dévoué prêtre, il prêtait généreusement son concours. Et puis, il n’avait pas froid aux moelles, ce Pascal. Les marmites prussiennes ne l’effrayaient pas. Maintes fois on l’avait vu aller ramasser des blessés en plein feu… Une fois, il avait eu une jambe écorchée par les balles. Et comme on lui faisait observer de ne pas s’exposer ainsi, il avait répondu en plissant ses petits yeux de chat taquin et pétillants de malice :

— Eh bien ce que j’en ris moi, des marmites boches !… Ça ne tue pas même les mouches ! Ah ! ces boches !… ajoutait-il en crachant par terre avec mépris, ils font bien plus de train que d’autre chose avec leurs « auwittesers » !… Et, tranquille, fumant sa pipe à grosses bouffées, la carabine en bandoulière — cette carabine avec laquelle Randall, on s’en souvient, avait voulu assassiner Jules Marion, et que ce dernier avait donnée à Pascal, en souvenir de l’affaire — donc la carabine en bandoulière Pascal s’attelait aux brancards, transportait les blessés et, comme l’abbé, il se tenait toujours à la disposition des ambulanciers.

Or, quand il avait appris la dernière tentative de Randall contre la vie de Jules, — de « l’élève de Monsieur le Curé » comme il disait,