Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/253

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tance était impossible une cinquantaine de nos soldats étaient blessés ou morts, les mitrailleuses démantelées brisées… les fusils cassés…

C’est à ce moment que ses regards se portèrent sur la galerie souterraine.

Jules surprit ce regard.

Raoul jeta l’ordre de retraiter et sans attendre se rua vers le souterrain conduisant à la mine.

Jules l’arrêta.

— Où vas-tu ? demanda-t-il.

— Mettre le feu à la mine !…

— Non… dit Jules d’une voix ardente et basse… Toi tu es nécessaire à nos amis. Moi, c’est différent… du reste, j’ai à me laver d’une tache d’infamie…

— Mais c’est une mort certaine… s’écria Raoul.

— Je le sais… cette mort sera ma réhabilitation !

— Tu le veux donc ?

— Absolument.

— Va donc grand cœur ! Et il serra la main que Jules lui tendait en disant :

— Merci !

L’instant d’après Jules Marion disparaissait dans la galerie.

Les Allemands n’étaient encore qu’à moitié chemin.

Mais les premiers rangs mettaient déjà les pieds sur cette partie du sol qui gardait la mort dans son sein.

Puis voyant que l’artillerie anglaise continuait à se taire — ne voyant venir aucune résistance de la tranchée de première ligne les cohortes prussiennes accélérèrent le pas.

Ce fut alors que se produisit l’effroyable coup de tonnerre…

On eût dit que la terre entière s’était ouverte pour lancer vers le ciel une masse de terre, de roches, d’armes, d’être humains déchiquetés

Un instant une demi-obscurité régna sur les lieux comme si un épais nuage eût intercepté les rayons du soleil.

Puis un déluge de terre et de débris de toutes espèces retomba sur le sol allant s’éparpiller sur une grande distance.

Enfin, la noire fumée de l’explosion se dissipa peu à peu, et il fut alors possible d’observer l’affreux spectacle.

Un immense cratère ouvrait vers le ciel sa gueule béante, et dans ce trou gisaient pêle-mêle un amas de membres humains brisés, déchirés sanglants — et tout cela remuait grouillait comme un nid de fourmis se tordant de rage et de douleur sous la bêche meurtrière du jardinier.

Et sur le bord opposé du cratère des bataillons prussiens considéraient l’affreux spectacle avec des regards d’épouvante et d’horreur.

La scène changea d’aspect.