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CHAPITRE PREMIER

LA TROUVAILLE DE PHILIPPE DANJOU.


Parmi les nombreux piétons qui, vers les quatre heures, se croisaient en cet après-midi d’octobre sur la rue Notre-Dame, entre la Place Jacques-Cartier et la Place d’Armes, on aurait pu remarquer un jeune homme par son air sombre, désespéré, et par sa mise misérable. Il marchait lentement, tête basse, les deux mains dans les poches de son pantalon, ne regardant personne, les yeux fixés sur le trottoir, ayant l’aspect de ces gueux des grandes villes qui vont par les rues cherchant de l’œil un portefeuille perdu, ou quelque objet de valeur qu’ils pourront vendre chez quelque regrattier juif.

Ce jeune homme, auquel les passants jetaient un regard de défiance ou de pitié, et dont l’âge ne devait pas dépasser vingt-cinq ou vingt-six ans, était excessivement maigre. La petite moustache noire qui naissait sur sa lèvre supérieure faisait cruellement ressortir la lividité de son visage. Sans le vêtement usé qui l’habillait, un pantalon effrangé, des bottines crevées et le chapeau melon très roussi qui s’enfonçait jusqu’à ses sourcils, ce garçon eût eu assez bon air. En l’observant avec attention on pouvait découvrir une certaine distinction qui perçait sous l’accoutrement misérable. Ses traits étaient réguliers, et ses yeux bruns, quand il osait les lever, étaient beaux ;