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Page:Fétis - Biographie universelle des musiciens, t1.djvu/255

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DE L’HISTOIRE DE LA MUSIQUE

sance excitent aujourd’hui le plus vif enthousiasme, et font le désespoir de ceux qui veulent essayer leurs forces dans le même genre de musique.

Depuis les succès de Lulli, le goût français s’était formulé : c’était celui de la déclamation théâtrale à l’Opéra, des chansons et des airs de danse dans toute autre espèce de musique. À l’opéra, il n’y avait que la musique de son fondateur qui résistait à l’effet du temps ; quelles que fussent les nouveautés qui voyaient le jour, le public n’avait d’enthousiasme que pour les ouvrages de Lulli. Campra, homme de quelque mérite, Colasse, Destouches et beaucoup d’autres s’étaient essayés sur la scène et y avaient fait paraître un assez grand nombre de productions ; mais telles étaient les préventions en faveur du style mis en vogue par leur prédécesseur, qu’il n’y avait eu pour eux d’autre moyen de se faire écouter qu’en l’imitant.

Le cantatille, sorte de diminutif de la cantate italienne, était devenue la pièce à la mode pour la musique de chambre. Ces cantatilles et les cantates de Batistin, de Bernier, de Clairembault, de Grandval, de Mouret, de Bourgeois, de Colin de Blamont et de Bouvard, étaient dans le style de l’opéra, c’est-à-dire dans le style déclamé, entremêlé de petits airs. Dans la musique d’église, Lalande était le modèle de tous les compositeurs ; modèle qui ne méritait pas les éloges qu’on lui accordait ; car, bien qu’il y ait quelques idées heureuses dans les motets de cet auteur, leur style est faible, l’harmonie assez incorrecte, et le caractère des chœurs, trop analogue aux chœurs de l’opéra.

Dans la musique instrumentale, la France eut quelques artistes qui se firent remarquer pendant le dix-huitième siècle, et comme virtuoses, et comme compositeurs. L’école française du violon eut alors pour chefs Leclere, homme d’un mérite réel, Baptiste et Senaillé. François Couperin, surnommé le grand, succéda à d’Anglebert, claveciniste de Louis XIV, et le surpassa dans l’art d’exécuter la musique la plus difficile. Son style est empreint du caractère de la musique de son temps, et ses nombreuses pièces de Clavecin ont de l’analogie avec les mélodies de Lulli ; mais elles sont en général écrites avec pureté, et leur mérite est en somme assez grand pour les faire ranger, même aujourd’hui, parmi les modèles du genre. Le Bègue, Boivin et plus tard Marchand, Calvière, Rameau et Daquin eurent de la réputation comme organistes et comme clavecinistes. De tous ces artistes, Rameau fut celui qui eut le plus d’imagination et de savoir. D’abord connu par ses pièces d’orgue et de clavecin, il sembla pendant quelque temps aban-