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Page:Fétis - Biographie universelle des musiciens, t1.djvu/256

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RÉSUMÉ PHILOSOPHIQUE

donner la pratique de son art pour la théorie, et il était déjà vieux quand il donna son premier opéra, dont le style, plus nerveux que celui de Lulli, plus modulé, plus riche d’effets, commença la réforme du goût des Français dans la musique dramatique.

Quelques représentations d’opéras italiens donnés à Paris, en 1752, contribuèrent beaucoup à hâter cette réforme. La musique de Leo, de Pergolèse et de Rinaldo de Capua trouva en France des admirateurs enthousiastes et de chauds adversaires. Les disputes avaient commencé entre les partisans de Lulli et ceux de Rameau ; elles se renouvelèrent pour établir la prééminence de la musique ultramontaine ou celle de la musique française. La première parut être vaincue dans cette lutte, car les chanteurs de l’Italie furent obligés de retourner dans leur patrie ; mais ils laissaient après eux le souvenir des nouveautés qu’ils avaient fait entendre et le besoin de les entendre encore. L’opéra comique naquit de l’imitation de cette musique légère, et ce fut lui qui disposa les esprits à la réforme complète du grand opéra. La transformation de celui-ci fut faite par Gluck, qui, saisissant bien l’instinct national pour la musique dramatique, créa la véritable tragédie-lyrique dans ses deux Iphigénie, dans Alceste, et dans Armide. L’arrivée de Piccinni et de Sacchini à Paris, et les ouvrages que ces deux grands musiciens écrivirent pour l’Opéra français, n’eurent pas moins d’influence sur la réforme du goût, quant à la mélodie. Il y eut encore de chaudes disputes entre les partisans de Gluck et de Piccinni, car les Français ont toujours disputé à propos de leurs plaisirs ; mais dans cette occasion, personne ne fut vaincu, et le beau seul triompha. Iphigénie, Armide, Alceste, Didon, Œdipe restèrent en concurrence au théâtre, et préparèrent le goût français à de nouvelles transformations qui furent opérées dans la suite par Méhul, Cherubini, Spontini, Rossini et Meyerbeer.

L’opéra comique, qui n’avait été d’abord qu’un spectacle de vaudeville, s’agrandit par les travaux de Duni, venu de l’Italie pour naturaliser en France la musique bouffe. Monsigny, Philidor, Grétry, Dalayrac, perfectionnèrent son ouvrage, et après eux, les formes du drame mêlé de dialogue et de musique furent modifiées et agrandies par Berton, Méhul, Lesueur, Cherubini, Catel, Boieldieu, Hérold, Auber, et quelques autres compositeurs.

Jusques vers la fin du dix-huitième siècle, les maîtrises des cathédrales et des collégiales furent les seules écoles de musique qu’il y eut en France. Elles produisirent un nombre considérable de bons musiciens par la persé-