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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/110

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X

M. Beaufils.


M. Beaufils ayant avancé son siège comme s’il prenait la présidence, dit avec aménité :

— Ma chère Demoiselle, veuillez, je vous en prie, nous découper votre vicomte. C’est le plat principal du présent festin…

Le vicomte de Marguerite n’avait pas bougé depuis que son front avait rebondi contre la table, et, certes, personne se s’occupait de lui.

— Mon vicomte, dit-elle, ne vaut peut-être pas Léon Malevoy, au point de vue de la figure et de l’intelligence, mais il est bien autrement vicomte ! On n’en fait plus comme cela qu’en Bretagne, où les princes marchent dans des sabots et où les filles d’auberge ont deux fois plus de quartiers qu’il n’en faut pour entrer dans les plus nobles chapitres de la Souabe. Mon vicomte a été à la croisade cinq ou six fois. Il est Joulou, cousin de Porhoët, et possède quelques droits à la duché de Bretagne par les Goëllo, juveigneurs de Dreux et comtes de Vertus ; il est Plesguen, parent de Rieux, aîné de Rohan ; il est Bréhut, descendance de Goulaine, mésallié aux Plantagenet d’Angleterre : une race de parvenus !… Tenez, savez-vous un peu de blason ? Voilà nos dernières alliances !

Elle ôta de son doigt un beau jaspe gravé en creux et le tendit à M. Beaufils qui ne prit que sa main pour l’effleurer galamment de ses lèvres. C’était décidément un personnage, ce M. Beaufils, mais il ne savait pas le blason.

— Je vais donc vous déchiffrer moi-même l’écusson du comte actuel, notre