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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/13

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— Un acte de naissance, répéta docilement Roland, un acte de mariage, un acte de décès.

— Bien. Il faut les trois : tout ou rien. Faute d’un seul, tu garderais ton argent… Tu as bien compris ?

— Parfaitement, ma mère.

— Alors, va… et reviens vite !

Roland se dirigea aussitôt vers la porte.

— Mais, objecta-t-il avant de passer le seuil, quand le notaire me donnera cet acte de naissance, cet acte de mariage, cet acte de décès, comment saurais-je si ce sont bien ceux que vous voulez, ma mère ?

Elle se leva toute droite sur son séant.

— C’est juste ! s’écria-t-elle. Défie-toi, défie-toi ! Tu as des ennemis, et cet homme vendrait son âme pour de l’argent ! L’acte de naissance, l’acte de mariage, l’acte de décès sont tous trois au même nom.

— Dites ce nom.

— Il est long. Écris-le pour ne pas l’oublier.

Roland prit une mine de plomb et un bout de papier. Elle dicta d’une voix plus altérée :

— Raymond Clare Fitz-Roy Jersey, duc de Clare.

— À bientôt, maman chérie, dit Roland sur qui ce nom ne sembla produire aucun effet. Raymond Clare Fitz-Roy Jersey, duc de Clare. Est-ce bien cela ? Oui. À bientôt.

Il sortit. Elle retomba, brisée, sur son oreiller, mouillé d’une sueur froide, et balbutia en fermant les yeux :

— Duc de Clare ! comte, vicomte et baron Clare ! comte et baron Fitz-Roy-Jersey ! Ce nom ! ce noble nom ! ces titres… Tout est à lui ! Mon Dieu ! ai-je bien agi ? que je voie l’enfant heureux et glorieux… Et puis que je meure !… Il est temps… Je deviens folle !