Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/162

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elle s’occupait du blessé comme du roi de Prusse !

Mais le blessé ne lui rendait point la pareille ; le blessé s’occupait d’elle énormément, au contraire : non point qu’il écoutât ses doléances, il s’agissait de bien autres choses. Le blessé suivait chacun de ses mouvements ; c’était un regard sournois et avide qui passait sous ses paupières baissées. On eût dit qu’il examinait le trousseau avec autant de soin, avec plus de soin que la Davot elle-même.

Et la sueur lui venait au front, tant il avait peine à contenir les battements de sa poitrine.

Le duc, la petite princesse et la mère Françoise d’Assise étaient réunis dans la cellule de cette dernière. Le duc ni sa fille n’en avaient jamais passé le seuil jusqu’alors. Ils étaient assis tous les deux sur les deux seuls sièges qu’il y eût. La mère restait debout.

Nita regardait avec un étonnement effrayé l’austère tristesse de cette solitude.

— Vous voyez, Monsieur mon neveu, dit la mère Françoise après un silence, que j’avais des motifs pour désirer votre présence.

— Je le vois, Madame ma tante, répliqua le duc de Clare.

La mère alla vers la ruelle de son lit et décrocha la miniature qui pendait à la muraille. Le duc la prit de ses mains et l’examina. Sous son calme apparent, il y avait de l’émotion.

— Je n’avais pas besoin de cela, dit-il. Je me souviens de mon frère Raymond, qui était mon aîné. Je crois m’être conduit envers lui en ami, en frère, en gentilhomme.

— Vous êtes un de Clare, Monsieur mon neveu, prononça la vieille religieuse avec emphase. Le fils de votre père ne pouvait pas se conduire autrement.

Comme le duc rendait la miniature, Nita y jeta un regard curieux et s’écria :

— On dirait que c’est le portrait du jeune homme !