Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/17

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Sainte-Marguerite, Roland, qui avait laissé « son Buridan » chez la voisine, avait déjà heurté deux Landri, un Gaulthier d’Aulnay, trois Orsini et un Enguerrand de Marigny. (Cet homme était peut-être un juste !) La rue Bonaparte n’existait pas encore, sans cela combien y eût-il coudoyé de filles de France, masquées et courant à l’orgie du bord de l’eau !

Dans la ruelle Taranne, il croisa Philippe d’Aulnay, ce jeune incestueux qui mourut à la fleur de l’âge. Au bout du passage du Dragon, Marguerite de Bourgogne (la reine !!!) lui proposa son cœur. À la Croix-Rouge, il culbuta la bohémienne qui aborde les cavaliers dans un but répréhensible. Pauvres vieux siècles qui sont comme le lion de la fable et qui ne peuvent plus se défendre !

— Où vas-tu Guénegoux ? demanda-t-il à un rapin de son atelier qui passait en Savoisy au tournant de la rue du Vieux-Colombier.

— À la Tour de Nesle ! lui répondit Guénegoux d’une voix terrible.

Et il sembla que toutes les rues de la patte-d’oie : la rue de Sèvres, la rue du Cherche-Midi, la rue de Grenelle, la rue du Four-Saint-Germain et la rue du Vieux-Colombier renvoyaient ce nom prestigieux, élevé sur un pavois, fait de tous les grondements joyeux, de tous les cris de trompe, de toutes les clameurs ivres, de tous les rires sonores du carnaval. Ainsi l’entendit Roland.

Comme il entrait rue Cassette, un homme sérieux qui avait bu, lui ouvrit paternellement ses bras en disant : Il est trois heures, la pluie tombe, Parisiens, dormez ! La Tour de Nesle était comme la vérité : dans le vin.

Quelle que fût l’autorité de cet homme sérieux, il mentait effrontément, sous son costume de veilleur de nuit. Quatre heu-