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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/246

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vous dérangez nullement pour nous.

Nita et Rose suivirent, le mouchoir aux lèvres, car la légère odeur de pipe était véritablement suffocante.

Rose dit à sa compagne, en regardant la taille courbée du comte :

— Celui-là ne t’aurait jamais fait de mal !

Nita releva sur elle ses grands yeux étonnés.

— Ah çà ! murmura-t-elle, qui donc veut me faire du mal ?

— Il faut que tu voies mon frère, répliqua Rose à voix basse, car le comte se retournait. Cherche un moyen. Il le faut.

M. le comte dit paisiblement et d’un ton de cicerone :

— Tout ceci est pour être démoli. On achète seulement le terrain.

Une circonstance remarquable, c’est que M. Baruque, d’ordinaire si liant, ne s’était pas joint à Gondrequin-Militaire pour faire les honneurs de l’atelier. Il avait quitté sa place auprès du poêle et fait un grand tour lors de l’entrée des étrangers. Ce tour l’avait amené derrière le groupe, composé de Mlle Vacherie, du Pitre, de l’Ours et autres saltimbanques qui entouraient notre ami Similor. M. Baruque disait de lui-même, quand il était en joyeuse humeur, que sa vocation vraie l’appelait vers la police ; il se vantait d’avoir l’oreille longue et l’œil américain.

Dès le matin, M. Baruque avait découvert qu’il existait, pour employer son propre style une « manigance » entre Similor et les modèles, gens sujets à caution. Il voulait savoir, quoique le gouvernement ne lui fît pour cela aucun cadeau annuel. Sa vocation l’entraînait.

Similor n’était pas d’une nature impénétrable. M. Baruque possédait l’adresse et la perspicacité innées du détectif. Entre eux, la partie n’était pas égale.

M. Baruque prit un godet à couleurs et se mit à broyer du bleu avec zèle. Il était placé de manière à entendre tout ce que disait Similor.

Celui-ci enflé comme un roué en bonne fortune, murmurait à l’oreille de Mlle Vacherie :

— On vous procurera toutes les voluptés de l’univers, châles boiteux, noces,