Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/287

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jour-là. Son frère l’avait demandée pour une fête de famille. Elle était charmante dans sa simple et fraîche toilette de ville. Elle pria d’abord comme Nita. La religieuse avait atteint son chapelet. Toutes trois restaient ainsi à genoux, dans l’ombre froide de la sépulture. Mais le vent qui passait sur l’humble jardin où le beau jeune homme rêvait, apportait de chaudes senteurs.

Nita dit :

— Mon pauvre bon père n’a pas de jardin, lui !

Des larmes coulaient sur sa joue. Rose la baisa.

On dit que les grains du chapelet prédisposent parfois à un repos salutaire. La religieuse dormait.

Un mouvement léger se fit dans les arbustes voisins. Nita et Rose tournèrent la tête en même temps. Le beau jeune homme était debout, à l’angle du monument, et les regardait.

Je ne sais pourquoi ce regard ne sembla ni indiscret ni coupable.

Le beau jeune homme, pourtant, se retira, inclinant avec respect sa haute taille. Une nuance rosée montait aux joues de Nita ; Mlle de Malavoy avait pâli.

Rose s’assit. Nita s’agenouilla de nouveau pour la prière d’adieu. Elle s’accusait d’être distraite ; malgré elle, Rose rêvait : on ne voyait plus le beau jeune homme, mais elles savaient toutes deux qu’il était là.

Elles se levèrent et s’embrassèrent encore. Elles s’entr’aimaient davantage et ne savaient pas pourquoi.

Avant d’éveiller la religieuse pour le départ, Nita murmura :

— J’aurais voulu avoir quelques fleurs pour laisser un bouquet à mon père.

Elles tressaillirent toutes deux. Le jeune homme était près d’elles et tenait des fleurs à la main.

— Acceptez-les, dit-il d’une voix douce qui remuait le cœur. Elles sont à ma mère.

Ce fut Rose qui les prit machinalement,