Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/306

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— Jeune homme ! répéta Roland en souriant. C’est léger vis-à-vis d’un duc, mon cher Monsieur de la Palud. Je badine quand cela me plaît.

— Nous parlons sérieusement, n’est-ce pas ? demanda brusquement Comayrol. Nous avions un plan de campagne en venant ici, mais on peut en changer si le terrain n’en veut pas. La conversation prend une drôle de tournure. Vayadioux ! Pourquoi tourner autour du pot ? j’ouvre la bouche, moi ; qu’en dites-vous, Jaffret ?

— Prenez garde ! fit l’ami des oiseaux, soyez prudent !

Comayrol haussa les épaules.

— Franc comme l’or ! poursuivit-il. Nous fendons-nous, Monsieur le duc ?

— C’est selon, répliqua Roland. Je vous passe parole.

— En un mot comme en mille, en mangez-vous, oui ou non ?

Roland resta froid. Jaffret avait des tics nerveux. Comayrol se renversa sur son siège et attendit une seconde ; après quoi il reprit :

— Vous êtes un joli garçon, Monsieur Cœur. En plaidant le faux comme on dit, pour savoir le vrai, vous avez presque démonté mon honorable ami et collègue, qui en a bien vu d’autres pourtant depuis qu’il a tiré à la conscription. Moi, j’aime les jeunes gens qui ont de la défense, et je crois bien que nous allons nous entendre nous deux… Alors, vous savez de quoi il retourne ?

— Pas le premier mot, repartit Roland. J’écoute.

— Bien ! très bien !… Ma parole, on dirait que vous tenez à être un vrai duc, même vis-à-vis de nous !

— Je ne tiens à rien, mon voisin. Je sais ce que je suis et je vous attends.

— De pied ferme, parbleu !… ne jaunissez donc pas comme cela, maître Jaffret ! Je vous dis que celui-là est un joli garçon, et que, pour dix mille écus comptant,